Publié le 15 septembre 2021 à 10h22.
Mis à jour le 24 avril 2022 à 23h33.

Objectifs de l’article

Deux questions reviennent chaque année lorsque l’on enseigne le taiji quan : à quelle fréquence devrait-on pratiquer la discipline pour en tirer des bénéfices ? Quelle devrait être la durée d’un d’entraînement pour être efficace ? Cet article a pour objectif d’apporter des éléments de réponse à ces deux questions.

Bien que cette page discute les entraînements de taiji quan, il est vraisemblable que l’ensemble des concepts présentés ici soient valables pour toutes les disciplines ayant pour objectif les relaxations du corps et de l’esprit.

Première considération concernant la fréquence d’entraînement idéale

Le premier article de ce blog expliqua que le taiji quan fut pendant plusieurs siècles un art martial développé par une famille chinoise, mais qu’aujourd’hui la locution « taiji quan » désigne aussi un très grand nombre de disciplines de santé et de bien-être, souvent ayant très peu de liens avec l’art originel. Néanmoins, toutes ces versions ont un point commun : elles sont généralement considérées comme des arts.

L’Europe a une tradition artistique de plusieurs millénaires. Il est couramment admis qu’un entraînement régulier, idéalement quotidien, est nécessaire pour développer un art à un bon niveau. Par exemple, l’enseignement de la musique se fait souvent à l’aide d’un cours hebdomadaire sous-entendant un travail quotidien de l’élève entre les cours. Sans ce travail quotidien, l’élève aurait peu de chance d’atteindre une maîtrise quelconque.

Le taiji quan est un art comme les autres à ce niveau. Il y a toujours une possibilité de progression vers une « perfection » que l’on n’atteindra jamais. Plus on pratique, plus on peut s’en approcher. Donc, un premier élément de réponse à la question de la fréquence d’entraînement idéale serait tous les jours si l’on souhaite avoir une haute maîtrise de l’art.

Une pratique quotidienne du taiji quan est utile (photo by Olya Kobruseva from Pexels).

Est-il indispensable d’atteindre un haut niveau en taiji quan pour en tirer des bénéfices intéressants ?

Non, il n’est pas indispensable de pratiquer cette discipline à un haut niveau pour en tirer des bénéfices intéressants. Un simple entraînement régulier d’une ou deux heures/semaine améliorera déjà les sensations de bien-être et de sérénité.

Néanmoins, la section suivante soulignera une différence importante entre le taiji quan et les arts traditionnels occidentaux justifiant une pratique plus intense de l’art martial chinois qu’une session hebdomadaire.

Un élément distinguant le taiji quan des arts traditionnels occidentaux

Nos arts ancestraux amènent vraisemblablement des bénéfices pour la santé et le psychisme, mais généralement, ils s’adressent plutôt aux sens dans le but de générer des émotions (musique, peinture, sculpture…), et/ou à la raison (littérature, cinéma, jeu vidéo…)

Inversement, le taiji quan a pour objectif de transformer notre corps avec pour conséquence une amélioration rapide de la santé physique et psychique.

De nombreux pratiquants de taiji s’épanouissant aussi dans un art traditionnel occidental affirment tirer plus de bénéfices de l’art martial chinois du point de vue du bien-être, de la sérénité, du pouvoir de concentration, de la santé, etc. Par contre, d’autres arts semblent dominer en ce qui concerne la variété des émotions ressenties.

Le taiji quan a en effet un gros impact sur le corps et le psychisme. Des études scientifiques ainsi que de nombreux témoignages de pratiquants de longue haleine attestent des bénéfices de la discipline sur le contrôle de la respiration, la sérénité, la sensation de bien-être général, la capacité à se détacher d’événements angoissants, le contrôle de ses émotions, l’équilibre, la coordination articulaire, la solidité osseuse, l’assouplissement des tendons, la diminution des problèmes de colonne vertébrale, la diminution des fractures chez les personnes âgées, la circulation sanguine, la tonicité générale du corps…

Ainsi, pratiquer intensément le taiji quan n’amène pas comme seule satisfaction la production d’émotions plaisantes, mais cette activité contribue aussi beaucoup à la santé et à l’épanouissement. Les pratiquants d’un bon niveau en parlent d’ailleurs souvent comme une voie vers le bonheur.

Par conséquent, plus on pratique le taiji quan, plus on se sent épanoui et serein dans le quotidien.

Une bonne séance de taiji quan peut amener suffisamment de calme intérieur pour se sentir heureux simplement en contemplant la nature (Photo de S Migaj from Pexels).

Le taiji quan et la pratique quotidienne

Deux points ont été soulignés plus haut : (i) il est généralement conseillé qu’un art soit pratiqué quotidiennement, même brièvement, plutôt que de façon irrégulière ; (ii) le taiji quan génère vraisemblablement des émotions moins variées que les arts traditionnels occidentaux, mais amènerait plus de bénéfices pour la santé, la sérénité et le bien-être, c’est-à-dire des clés essentielles au bonheur.

Voyons l’intérêt de pratiquer quotidiennement du taiji, même pour une courte session, par rapport à un entraînement irrégulier.

La sédentarité et le stress ne font qu’augmenter depuis plusieurs décennies dans nos contrées.

En effet, concernant la sédentarité de plus en plus d’outils nous épargnent les efforts physiques pour le bricolage, les déplacements, les activités ménagères et tout ce qui nous occupe dans notre quotidien. En outre, les écrans remplacent petit-à-petit nos loisirs, nous rivant dans un fauteuil ou sur une chaise une partie toujours croissante de notre temps libre. Les français passaient en moyenne 5 heures/jour devant un écran en dehors de leur activité professionnelle avant la crise du covid-19. Cette durée est passée à 6 heures/jour depuis le premier confinement du printemps 20201Il s’agit du temps passé devant un écran sans lien avec l’activité professionnelle et non du temps passé devant un écran en dehors de son lieu de travail.

Pour l’augmentation du stress, on peut en citer de nombreuses causes parmi lesquelles l’amplification permanente de la pression professionnelle pour le Saint Profit, le poids croissant des pertes d’emplois, l’influence négative de plus en plus forte des multinationales et de la mondialisation sur notre quotidien, la dégradation toujours plus forte de la planète en raison de l’activité humaine, les dégâts pour la santé des produits chimiques et de la malnutrition, etc.

Cette accumulation de stress entraîne de plus en plus de crispations. Des muscles légèrement contractés en permanence entravent une bonne circulation du sang diminuant ainsi l’oxygénation des organes, et contribuent à la sensation continue de malaise et d’angoisse que beaucoup ressentent dans leur quotidien. Le manque d’activités physiques dans notre société sédentaire gêne l’évacuation de ce stress, laissant la majorité des gens dans un sentiment de tension intérieure et d’inquiétude permanentes.

Outre ses bienfaits généraux pour la santé, la pratique quotidiennement du taiji quan ou d’une activité similaire de qualité contribue à lutter contre cette augmentation de stress.

En effet, les relaxations physique et psychique sont au cœur de la discipline. On les travaille sans interruption pendant les entraînements. Ainsi, consacrer tous les jours une vingtaine de minutes ou plus à une activité pendant laquelle on décontracte activement le corps et l’esprit (ce qui est très différent de se reposer passivement) est fondamental pour limiter le stress et retrouver un début de sérénité.

Vaut-il mieux plusieurs courtes séance de taiji quan ou une plus longue de durée totale équivalente ?

Il est indiqué dans la section précédente qu’une pratique quotidienne du taiji quan, même de courte durée, est très utile pour entretenir continûment les relaxations du corps et de l’esprit. Sans cela, le stress conduira à de plus en plus de crispations au fil des jours. Cela soulève une question. Vaut-il mieux effectuer de nombreuses petites séances d’entraînement sur une journée pour entretenir la détente du lever au coucher, ou effectuer une longue session unique de durée équivalente à celle de la somme des petites sessions ?

Comme on peut s’en douter au vu des explications précédentes, effectuer régulièrement dans la journée de courtes sessions de taiji aide à maintenir de façon persistante notre corps et notre psychisme dans un bon état de décontraction. Se ressourcer régulièrement en relaxation active fait partie des bases de la sérénité.

De courtes sessions régulières de taiji quan en journée aident à garder le corps et l’esprit dans un état de relaxation persistant (photo de Gallio de Pexels).

Mais les longues sessions sont indispensables pour améliorer son art. En effet, une longue séance a pour avantage d’amener les relaxations musculaire et psychique à un niveau plus profond qu’un entraînement de même durée totale mais morcelé en plusieurs sessions. Cela provient du fait que les contractions corporelles augmenteront systématiquement entre deux séances. Ainsi, une partie du deuxième entraînement ne servira qu’à revenir au niveau de décontraction du premier. Ce ne sera qu’à ce moment que le travail de la deuxième session mènera au-delà de celui de la première séance. En consacrant ainsi une partie de chaque nouvel entraînement à revenir au même niveau de décontraction que le précédent, on terminera la dernière session à un niveau de décontraction plus faible que si l’on avait effectué une seule séance de durée équivalente à celle la somme de toutes les sessions.

Par conséquent, une longue session amènera le corps dans un état de décontraction plus profond qu’avec de courtes séances cumulées. Ce gain de relaxation permettra de mieux affiner les postures et les mouvements, conduisant ainsi à de nouvelles sensations et à l’exploration de territoires inconnus indispensables à l’amélioration de son art. Les longues sessions sont donc la clé du progrès qui rendra les courtes séances d’entretien de plus en plus efficaces.

Ainsi, on peut considérer les courtes sessions comme un moyen de nous maintenir dans un niveau persistant de relaxation. Cette détente continue est source de santé, de bien-être et de sérénité. Par contre, une longue session sera le véritable moteur de progression pour rendre plus efficaces les séances d’entretien.

Durée minimale conseillée d’une longue séance d’entraînement

La période de 20 minutes est souvent avancée par les maîtres asiatiques comme une durée minimale pour un entraînement efficace. Certains vont jusqu’à dire que le vrai travail ne commence qu’après 20 minutes.

Cette période est à mettre en relation avec le temps nécessaire pour un muscle fortement contracté pour revenir à sa longueur d’équilibre du repos pour un jeune en bonne santé. Tout astronome sait que cette durée vaut 20 minutes.

Effectivement, un muscle ne peut être que bandé ou laissé au repos. Pour bander un muscle on produit un potentiel électrochimique qui contractera les fibres musculaires. Pour le reposer on arrête de produire le potentiel électrochimique provoquant ainsi le relâchement des fibres. Ainsi, bander un muscle entraînera son raccourcissement, le relâcher le laissera lentement revenir à sa longueur d’équilibre du repos. Il n’existe pas de potentiel électrochimique négatif permettant d’allonger un muscle pour le ramener à cette longueur d’équilibre. On ne peut qu’utiliser d’autres muscles pour provoquer un étirement du muscle cible. Si l’on n’effectue pas d’étirement, un muscle contracté nécessite 20 minutes de repos pour retrouver seul sa longueur d’équilibre du repos.

Comme ce fut mentionné plus haut, les astronomes le savent car le diamètre de la pupille s’adapte spontanément à la quantité de lumière atteignant l’œil sans que l’on puisse agir sur ce diamètre. En cas de pénombre, la pupille se dilatera pour laisser entrer plus de lumière dans l’œil. Ainsi, si l’on pénètre dans un endroit très sombre en venant d’un autre bien illuminé, nous ne verrons pas grand chose pendant les premières secondes, le temps que la pupille se dilate suffisamment pour les nouvelles conditions d’éclairage. Les astronomes savent que lorsque l’on pénètre dans le noir pour l’observation du ciel en venant d’une pièce bien éclairée, les étoiles apparaîtront de plus en plus lumineuses jusqu’à ce que la pupille atteigne son diamètre maximal, c’est-à-dire après 20 minutes. Cette durée est approximativement la même pour tous les muscles.

On comprend donc l’héritage culturel asiatique suggérant que 20 minutes soient nécessaires avant qu’un travail devienne optimal pour une discipline requérant un niveau profond de relaxation musculaire. C’est le temps nécessaire à un muscle pour retrouver son état d’équilibre au repos.

Des d’entraînements de taiji quan de plus de 20 minutes sont indispensables pour progresser (photo de Jordan Benton de Pexels).

Par conséquent, une séance d’entraînement destinée à progresser dans la discipline devrait durer plus de 20 minutes pour être efficace. Dans le cas contraire, elle pourrait n’être considérée que comme une séance d’entretien.

Conclusion

La réponse finale aux deux questions relatives respectivement à la fréquence et à la durée des entraînements est selon moi qu’il n’y a pas de règle. Dans l’idéal il est utile de pratiquer quotidiennement des sessions courtes de taiji quan ou d’autres activité similaires pour maintenir en permanence le corps et l’esprit dans de bons niveaux de relaxation. C’est important pour la santé, la sensation de bien-être et l’épanouissement. Mais compléter ces sessions courtes par de plus longues de plus de 20 minutes destinées à nous faire progresser reste indispensable. Ces longs entraînements nous conduiront à un meilleur niveau rendant plus efficaces les séances d’entretien.

Plus on travaille le taiji quan, plus les bénéfices pour la santé, la sérénité et le bonheur seront importants. C’est à chacun de décider quel temps il est prêt à allouer à son épanouissement, et de déterminer comment développer ce dernier.